Renforcer la protection des littoraux européens

29/04/2024

Enjeux. La résilience des territoires littoraux, dans le monde et singulièrement en Europe, est un défi majeur en raison des nombreuses pressions qui s'y exercent et que le changement climatique rend plus impactant, en particulier l'élévation du niveau de la mer et de l'océan, et le recul du trait de côte. 20-25 % du littoral Atlantique est soumis à un phénomène d'érosion, auquel s'ajoutent le risque de submersion marine, et dans certains cas, d'inondation le long des fleuves, rivières et marais. Ces risques posent la question de la prévention des risques, de la lutte contre ces phénomènes, de l'accompagnement des populations et de la recomposition des territoires concernés. Des risques naturels aggravés par le réchauffement climatique.

Menaces. Selon un rapport de l'UE, les densités de population sont plus élevées le long du littoral européen et continuent de croître plus rapidement que celles de l'intérieur des terres. Entre 1990 et 2000, les superficies artificielles (routes et zones d'habitats en premier lieu) dans les zones côtières ont augmenté. Les pays ayant connu le développement le plus rapide sont le Portugal (34 % d'augmentation de l'artificialisation en 10 ans), l'Irlande (27 %), l'Espagne (18 %), suivis par la France, l'Italie et la Grèce. La France fait partie des pays les plus menacés par la submersion marine avec la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

Vulnérabilité. Les territoires du littoral sont particulièrement vulnérables aux impacts du changement climatique : ils sont particulièrement denses avec une population plus âgée que la moyenne et pourraient accueillir 40 % de la population d'ici 2040 (source Insee). Ils accueillent également des activités économiques stratégiques (tourisme, pêche, industrie portuaire et logistique, énergies renouvelables, etc.) et sont des réservoirs de biodiversité marine et terrestre. Selon le ministère de la Transition écologique, 1,4 million de résidents, 850 000 emplois, 165 000 bâtiments et 864 communes sont menacés aujourd'hui par la submersion marine, tandis qu'un quart des côtes métropolitaines est affecté par l'érosion.

En Bretagne. Avec 2 700 km de linéaire côtier (soit 30% du linéaire métropolitain) et ses quatre départements littoraux, la Bretagne est globalement exposée aux phénomènes d'érosion du littoral et de recul du trait de côte. On estime que 18 % du linéaire « naturel » est en érosion, la vitesse des phénomènes étant variable. S'ajoutent à cela les côtes artificialisées par divers ouvrages (plus d'un quart du linéaire régional) qui connaissent régulièrement des dégâts et n'empêchent pas l'amaigrissement voire la disparition de certaines plages à leurs pieds. En définitive, en Bretagne, 42 000 logements sont menacés par le recul du trait de côte.

En Pays Basque. De l'embouchure de l'Adour à la frontière espagnole, le littoral basque s'étend sur un linéaire d'une 40aine kilomètres de côtes rocheuse et sableuse, et présente une alternance de zones urbaines et de zones naturelles ou anthropisées. Ce littoral est fortement soumis aux phénomènes d'érosion et de submersion marine. L'aléa érosion à l'horizon 2023/2050 est le suivant :le recul moyen est de 20 cm/an en zone rocheuse, et de 50 cm/an en zone sableuse.

L'Union Européenne, un acteur trop timide. L'« enjeu littoral » est aussi européen. C'est malheureusement une priorité encore peu abordée par l'UE : absence de cadre législatif clair, priorité aux politiques nationales, alors que rien ne fait obstacle à une intervention forte de l'Europe, absence d'outil financier dédié… Cela n'a pas empêché l'Union européenne de prendre des initiatives utiles en matière de développement durable du littoral de deux manières, d'abord à travers différentes politiques dont la politique de l'environnement et, ensuite, à travers la promotion de la stratégie de gestion intégrée des zones côtières. Les instruments juridiques de gestion des risques côtiers sont multiples mais trop dispersés : nombreuses Directives sur le risque pollution, risque de pertes de diversité biologique, risque d'inondation (ex. Directive 2007/60/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 octobre 2007, relative à l'évaluation et à la gestion des risques d'inondation). Ainsi, contrairement au risque d'érosion, le risque d'inondation a fait l'objet d'une directive qui a pour objet d'établir un cadre pour l'évaluation et la gestion de ce type de risques –évaluation préliminaire, cartes des zones inondables, cartes des risques, plans de gestion – dont l'actualité a montré la gravité en zones côtières.

Nos propositions

L'UE doit dépasser une approche purement législative et morcelée, qui manque de lisibilité, d'efficacité et d'effet d'entrainement. C'est assez paradoxal : on a créé des instruments, on s'est doté d'outils sans penser ni poser une stratégie globale de gestion des risques côtiers.

  1. Définir une stratégie claire et ambitieuse, en fixant une vision à la fois globale et adaptée aux spécificités des littoraux (baltique, mer du nord, Manche, atlantique, Méditerranée, et territoires d'outre-mer)

  2. Construire un cadre législatif unique et cohérent : une Directive « Erosion littorale et Submersion marine »

  3. Doter l'UE d'un instrument financier dédié à la prévention (études scientifiques, surveillance, information des autorités nationales et locales, information des populations…) et à la lutte contre le recul du trait de côte (érosion et submersion)

  4. Régionaliser l'élaboration de cette stratégie européenne et la gestion de l'instrument financier (qui pourrait prendre la forme d'une Initiative Européenne ou être intégrée à la prochaine génération des Fonds européens)

Jean Tellechea, candidat EAJ-PNB pour le Pays Basque